Les farces sont de courtes pièces théâtrales dont le ton et les thèmes sont profanes. Elles se moquent souvent des puissants. Leurs auteurs sont anonymes.
« La farce du cuvier » raconte de façon comique les démêlés de Jaquinot avec sa femme et sa belle-mère. Elle est considérée comme une habile variation sur le thème de « la femme qui porte la culotte », au grand dépit de son mari, ravi de trouver une occasion de se venger et de reprendre le dessus.
Résumé
Le malheureux Jaquinot est affublé non seulement d'une femme acariâtre mais aussi d'une belle-mère qui prend toujours le parti de sa fille. On le somme de faire tout et n'importe quoi, à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. Finalement, il accepte de mettre par écrit la liste des tâches qui lui sont assignées, afin de ne pas en oublier.
Extrait
Pour « La farce du cuvier », on ne peut pas dire qu'il existe vraiment un texte original. Les plus vieux ouvrages connus sont postérieurs au Moyen Âge.
LA MÈRE. — Ensuite, Jaquinot, il vous faut pétrir et faire cuire le pain, faire la lessive...
LA MÈRE. — Apres, Jaquinot, il vous faut Boulenger, fournier, buer,
LA FEMME. — Tamiser la farine, laver, décrasser...
LA FEMME. — Bluter, laver, essanger.
LA MÈRE. — Aller, venir, trotter, courir, et vous démener comme un diable.
LA MÈRE. — Aller, venir, courir, trotter, Peine avoir comme Lucifer,
LA FEMME. — Faire le pain, chauffer le four...
LA FEMME. — Faire le pain, le four chauffer.
LA MÈRE. — Aller faire moudre au moulin...
LA MÈRE. — Mener la mousture au moulin,
LA FEMME. — Faire le lit, tôt le matin, sous peine d'être bien battu...
LA FEMME. — Faire le lict au plus matin, Sur peine d'estre bien bastu,
LA MÈRE. — Et puis mettre le pot au feu et tenir la cuisine nette.
LA MÈRE. — Et puis mettre le pot au feu, Et tenir la cuisine nette.
JAQUINOT. — S'il faut que j'écrive tout ça, il faut le dire mot à mot.
JAQUINOT. — Si fault que tout cela se mette, Il fauldra dire mot a mot.
LA MÈRE. — Allons ! écrivez donc, Jaquinot : Pétrir le pain...
LA MÈRE. — Or escripvez donc, Jaquinot : Boulenger,
LA FEMME. — Le faire cuire...
LA FEMME. — Fournier,
LA MÈRE. — Faire la lessive...
LA MÈRE. — Buer;
LA FEMME. — Tamiser la farine...
LA FEMME. — Bluter,
LA MÈRE. — Laver...
LA MÈRE. — Laver,
LA FEMME. — Décrasser...
LA FEMME. — Et essanger.
JAQUINOT. — Laver quoi ?
JAQUINOT. — Laver quoy ?
LA MÈRE. — Les pots et les plats.
LA MÈRE. — Les potz et les platz.
JAQUINOT. — Attendez, n'allez pas trop vite... (écrivant). Les pots, les plats...
JAQUINOT. — Attendez, ne vous hastez pas: Les potz, les platz
LA FEMME. — Et les écuelles.
LA FEMME. — Et les escuelles.
JAQUINOT. — Parsambleu, moi qui n'ai pas de mémoire, je n'arriverais pas à tout retenir.
JAQUINOT. — Et, par le sang bieu, sans cervelle Je ne sçaurois tant retenir.
LA FEMME. — Écrivez-le pour vous en souvenir. Vous entendez ? Car je le veux.
LA FEMME. — Mettez, pour vous en souvenir ; Entendez vous ? car je le veulx.
Une version moderne du texte, tirée de « Fables et fabliaux du Moyen Âge », traduite par Christian Poslaniec et adaptée par Robet Boudet, publiée par l'École des loisirs en 1986.
Cette version a été reprise d'un livre du XVIe siècle, appartenant à la Bibliothèque Royale de Copenhague, par Émile Picot et Christophe Nyrop dans « Nouveau recueil de farces françaises des XVe et XVIe siècles », Paris : Damascène Morgand et Charles Fatout, 1880. Extrait tiré des pages 13 à 16 (consultable sur Gallica)
La farce du Cuvier
Résumé
Extrait
Boulenger, fournier, buer,
Peine avoir comme Lucifer,
Sur peine d'estre bien bastu,
Et tenir la cuisine nette.
Il fauldra dire mot a mot.
Boulenger,
Les potz, les platz
Je ne sçaurois tant retenir.
Entendez vous ? car je le veulx.
traduite par Christian Poslaniec et adaptée par Robet Boudet,
publiée par l'École des loisirs en 1986.
Paris : Damascène Morgand et Charles Fatout, 1880.
Extrait tiré des pages 13 à 16 (consultable sur Gallica)